Plus les jours passent, plus l'adhésion des Français aux «gilets jaunes» progresse. 84 % des Français trouvent le mouvement justifié, selon notre enquête Odoxa-Dentsu Consulting réalisé avec Franceinfo. C'est 7 points de plus que lors de la dernière vague du 22 novembre, et 10 points de plus par rapport à la première mesure, du 16 novembre. «Ni les images de violences et de dégradations choquantes de ce week-end, ni surtout l'intervention d'Emmanuel Macron mardi n'ont permis d'atténuer le soutien au mouvement. Bien au contraire, il semble même que l'intervention d'Emmanuel Macron et ses annonces n'ont fait que renforcer la colère», analyse Gaël Sliman, le président d'Odoxa. Les sympathisants du Rassemblement national (96 %) sont ceux qui soutiennent le plus les «gilets jaunes», suivis des Insoumis (92 %) et des socialistes (90 %). L'adhésion tombe à 77 % chez les sympathisants Les Républicains. Les macronistes sont partagés: 50% trouvent le mouvement justifié, autant pensent le contraire.
Selon l'enquête, les deux tiers des Français ont été exposés au discours d'Emmanuel Macron, mardi, lors duquel il a répondu aux manifestants. Mais 78 % d'entre eux ne l'ont pas trouvé convaincant. «C'est le pire niveau enregistré depuis que nous post-testons des interventions ou annonces du président», relève Odoxa. Seuls les sympathisants LaREM qui ont été convaincus (71 %). Toutefois, le sondeur note que «si le président n'a pas convaincu, ce n'est pas parce que les principales mesures qu'il a annoncées suscitent le rejet de l'opinion». Car 67 % des Français approuvent l'augmentation de l'investissement dans les énergies renouvelables de 5 à 8 milliards d'euros, 66 % valident l'organisation d'une concertation nationale sur la transition énergétique qui intégrera les «gilets jaunes», 61 % jugent favorablement la modulation des taxes sur les carburants en fonction du prix du pétrole et 56 % se félicitent de la réduction de la part du nucléaire à 50 % à horizon 2035.
Toutefois, 75 % des Français pensent que ces mesures vont accentuer les inégalités, 73 % imaginent qu'elles vont nuire au pouvoir d'achat et 55 % ne pensent pas que ces décisions permettront d'agir efficacement sur l'environnement et le climat.
Au-delà des annonces présidentielles, les Français sont déçus du refus du chef de l'État d'annuler les hausses de taxes sur les carburants, qui entreront en application en janvier prochain. 79 % des sondés pensent que le chef de l'État a tort de persister. S'il était revenu sur cette taxation, «sans doute Emmanuel Macron aurait davantage convaincu et les “gilets jaunes” auraient obtenu un soutien moins important», souligne Gaël Sliman.
Véronique Reille, qui dirige Dentsu Consulting, a analysé les messages postés sur les réseaux sociaux à l'issue de l'intervention du président de la République. Le discours, a été «très commenté», avec plus de 313.000 messages, mais a été jugé «long» et a finalement été «mal perçu». Elle évoque «l'incompréhension» qui s'installe entre les «gilets jaunes» et le chef de l'État. «Ce constat d'incompréhension et de non-écoute pousse à la radicalisation et lance des débats sur les pages des “gilets jaunes”», écrit-elle. Parmi les mots les plus utilisés par les internautes, «technocrate» est le plus récurrent.
Dans le même temps, Véronique Reille rapporte que les «gilets jaunes» sont divisés entre eux. «Tous sont d'accord pour affirmer qu'Emmanuel Macron ne leur a pas apporté de réponses, mais la suite du mouvement avec un “acte III à Paris” (le nom de la page Facebook qui invite à une nouvelle mobilisation samedi, NDLR) clive toutefois», note-t-elle. Alors que des représentants «gilets jaunes» ont été présentés, «leur capacité à fédérer est souvent remise en cause», dit l'analyste.