Vers une nouvelle trêve entre l’Arabie saoudite et les Houthis au Yémen
samedi 22/avril/2023 - 01:51
Une vaste opération d’échange de prisonniers a débuté vendredi au Yémen entre camps ennemis, a annoncé le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), au moment où l’Arabie saoudite cherche à négocier une trêve avec les rebelles dans ce pays ravagé par la guerre.
« Le premier avion a quitté Sanaa » dans le cadre de cet échange, a indiqué à l’AFP Jessica Moussan, chargée des relations avec les médias au CICR, qui supervise l’opération. L’avion, en partance de la capitale contrôlée par les rebelles Houthis, se dirige vers Aden, où siège temporairement le gouvernement soutenu par l’Arabie saoudite. Un autre avion est parti peu après d’Aden pour Sanaa.
Fin mars, le gouvernement, reconnu par la communauté internationale, et les rebelles avaient conclu un accord à Berne, en Suisse, pour échanger plus de 880 prisonniers, dont des Saoudiens et des Soudanais. La dernière opération de cette ampleur remonte à octobre 2020, lorsque plus de 1000 prisonniers avaient été libérés.
L’Arabie saoudite voisine intervient au Yémen depuis 2015 pour appuyer les forces progouvernementales contre les Houthis, des rebelles soutenus par l’Iran, et qui, en huit ans de conflit, se sont emparés de vastes pans du territoire du nord et de l’ouest de ce pays le plus pauvre de la péninsule arabique.
L’accord de Berne avait été conclu après un réchauffement inattendu des relations entre l’Arabie saoudite et l’Iran, deux poids lourds du Golfe qui s’opposent sur divers dossiers, et parfois même par camps interposés dans les conflits du Moyen-Orient, comme au Yémen ou en Syrie.
Dans ce contexte, l’Arabie saoudite accueille vendredi une réunion de plusieurs pays arabes pour discuter d’un possible retour de la Syrie, soutenue par l’Iran, au sein de la Ligue arabe dont elle a été exclue depuis la violente répression de la révolte en 2011.
« Lueur d’espoir »
À l’aéroport de Sanaa et d’Aden, les familles de proches de prisonniers les attendent avec impatience. « Mon fils est détenu depuis 2018 », a raconté à l’AFP un habitant de Sanaa, Abdallah Al-Hajouri. « Ça fait cinq ans maintenant. Il me manque tellement »
« Des milliers d’autres familles attendent toujours d’être réunies », a rappelé l’émissaire de l’ONU pour le Yémen, Hans Grundberg, tout en saluant l’opération qui a débuté vendredi.
Celle-ci rappelle que « le dialogue constructif et les compromis mutuels sont des outils puissants permettant d’aboutir à de grands résultats », a-t-il ajouté dans un communiqué.
La guerre au Yémen a provoqué l’une des pires crises humanitaires au monde, avec des centaines de milliers de morts et des millions de déplacés, dans un contexte d’épidémies, de manque d’eau potable et de faim aiguë. Plus des trois quarts de la population dépendent d’une aide internationale qui ne cesse pourtant de diminuer.
Le processus d’échange de prisonniers doit se dérouler sur trois jours dans diverses régions du Yémen et de l’Arabie saoudite, a précisé dans un communiqué le CICR.
« Avec ce geste de bonne volonté, des centaines de familles déchirées par le conflit seront réunies pour le ramadan, apportant une lueur d’espoir au milieu de grandes souffrances », a déclaré Fabrizio Carboni, directeur du CICR au Moyen-Orient, en référence au mois de jeûne musulman en cours.
Cité dans le communiqué, il a formulé l’espoir que « ces libérations donnent un élan pour une solution politique plus large ».
« Discussions positives »
Jeudi, une délégation saoudienne est repartie de Sanaa avec un « accord préliminaire » de trêve et la promesse de « nouveaux pourparlers », selon un responsable rebelle qui a souhaité garder l’anonymat.
Les discussions à Sanaa ont été « sérieuses et positives » avec des « progrès sur certaines questions », a assuré sur Twitter le négociateur en chef des Houthis, Mohammed Abdelsalam.
Selon des sources du gouvernement yéménite, qui ont requis l’anonymat, les discussions portent sur une trêve de six mois ouvrant la porte à une période de pourparlers de trois mois au sujet d’une transition qui durera deux ans, au cours de laquelle la solution finale sera négociée entre toutes les parties.
La trêve doit permettre de répondre aux deux exigences principales des rebelles : le paiement par le gouvernement des salaires des fonctionnaires dans les zones rebelles et la réouverture de l’aéroport de Sanaa, strictement contrôlé par l’aviation saoudienne.
L’année dernière, les parties avaient déjà observé une trêve de six mois. Si elle n’a pas été officiellement reconduite après son expiration début octobre, la situation est restée relativement calme sur le terrain.