Vers une nouvelle étape de la coopération franco-britannique en matière de défense
Alors que nos deux pays établissent leur nouvelle programmation de leurs dépenses militaires, nous avons tout intérêt à travailler ensemble pour adapter nos réponses et ainsi démultiplier notre force pour nous et nos alliés.
Nous avons une responsabilité envers l’Ukraine. L’Otan a besoin de nos forces armées, aguerries par 30 ans d’opérations extérieures. L’autonomie stratégique de l’Europe a tout à gagner d’un partenariat solide entre la France et le Royaume-Uni, afin de ne pas être tributaire de paysages politiques changeants ailleurs. Ensemble, nous représentons la moitié de la force militaire de l’Europe – notre coopération est fondamentale pour la sécurité de l’Europe. Nos approches en Afrique, au Moyen-Orient et dans l’Indopacifique sont par ailleurs souvent complémentaires : notre présence et notre capacité d’action sont des leviers de stabilisation au niveau international.
Depuis 30 ans, la France et le Royaume-Uni entretiennent une coopération militaire au service de la sécurité de l’Europe. Après un effort commun salvateur en Bosnie-Herzégovine en 1995, puis l’impulsion décisive du sommet de Saint-Malo en 1998, Paris et Londres ont pu franchir une étape historique en signant les deux traités dits de « Lancaster House » en 2010. Ceux-ci ont permis de lancer une coopération sans précédent dans le domaine de l’armement et de la recherche nucléaire, à l’image de l’installation de recherche commune EPURE. Nous devons relancer cette dynamique.
Nous, les quatre présidents des commissions de défense de nos parlements respectifs, appelons nos gouvernements à relancer avec audace la coopération franco-britannique en matière de défense en donnant un nouveau souffle aux accords de Lancaster House.
Nos deux nations pourraient intensifier leur collaboration de plusieurs manières. Tout d’abord, il leur appartient d’utiliser pleinement la Force expéditionnaire conjointe franco-britannique afin d’offrir à l’Europe une capacité de réaction rapide éprouvée.
Deuxièmement, nous devons rester attachés au traité sur l’interdiction des armes nucléaires et poursuivre la collaboration nucléaire afin de garantir la crédibilité de notre force de dissuasion, qui sert les intérêts de sécurité de l’Europe dans son ensemble.
Nous devons également tirer le meilleur parti de notre présence dans la région indopacifique pour renforcer la sécurité de nos alliés et des routes commerciales essentielles dont dépendent nos économies. Nous devrions intensifier notre collaboration face aux conflits hybrides, à la cyberguerre, à la sécurité des fonds marins et à la militarisation de l’espace. Enfin, nous devrions soutenir la coopération de nos industries de défense au service d’une capacité souveraine renforcée du « pilier européen de l’Otan ».
Londres et Paris disposent d’atouts stratégiques majeurs qui renforcent la sécurité de l’Europe et préservent le modèle démocratique que des compétiteurs mal intentionnés cherchent à affaiblir, voire à détruire. Les Parlements français et britannique sont prêts à jouer tout leur rôle en réactivant les commissions quadripartites de suivi de la mise en œuvre des accords de Lancaster House et en intensifiant leur travail bilatéral. Il y a tout à gagner à relancer une coopération étroite entre nos deux gouvernements et nos deux parlements. Nous devons saisir cette opportunité maintenant, ou en assumer les conséquences demain.