Poutine annoncé "mourant": propagande de Kiev ou secret bien gardé de Moscou?
"Vladimir Poutine est malade depuis très longtemps, sa mort va arriver vite", a lancé mercredi Kyrylo Boudanov, directeur du renseignement militaire ukrainien, déclarant que le président russe était "mourant", touché par un cancer. Une nouvelle qui pourrait modifier le cours de la guerre en cours en Ukraine, si elle s'avère vraie.
Ce n'est en effet pas la première fois que le président russe est présenté comme souffrant depuis le début du conflit: il a déjà été annoncé malade d'un cancer de la thyroïde ou atteint de Parkinson. Mais Vladimir Poutine a depuis continué ses apparitions publiques et n'a montré aucun signe clair de maladie, selon BFMTV.
Pour la dernière annonce en date, la question se pose donc de savoir si les renseignements ukrainiens ont réellement pu avoir accès à de telles informations. Sur ce sujet, maintes fois instrumentalisé, il est très difficile d'avoir des indices clairs.
"Personne ne connait le véritable état de santé de Vladimir Poutine"
Le directeur du renseignement militaire ukrainien Kyrylo Boudanov "a 36 ans mais il est déjà général major des services du renseignement, c'est un homme clé", explique Ulysse Gosset, éditorialiste politique étrangère pour BFMTV, il représente "la nouvelle génération des militaires ukrainiens". La dernière déclaration en date ne vient pas de n'importe qui, et elle est faite face caméra, en interview dans un grand média américain. L'éditorialiste explique également que les Russes lui attribuent l'attaque du pont de Crimée début octobre, ce qui laisse penser qu'il s'agit d'un militaire redouté par Moscou.
D'autre part "derrière le renseignement ukrainien, il y a le renseignement américain", souligne auprès de BFMTV.com Alexandre Melnik, ancien diplomate à Moscou. Selon lui, il faut donc écouter ce que les espions de Kiev déclarent, "mais prendre les informations avec beaucoup de pincettes, car elles sont forcément partisanes".
Concernant la maladie de Vladimir Poutine, il reste toutefois catégorique, assurant que "personne ne connait le véritable état de santé de Vladimir Poutine, c'est le secret d'État le plus protégé".
En juillet dernier, l'information inverse avait circulée. Le chef de la CIA avait affirmé que le président russe était en très bonne santé, écartant les rumeurs sur l'aggravation de son état.
Pour Floran Vadillo, spécialiste du renseignement, dans les deux cas, "quand on sait comment Vladimir Poutine se comporte, l'isolement dans lequel il vit (...) on peut comprendre qu'il y a en réalité assez peu de chance pour qu'il y ait des sources de renseignement ukrainiennes ou même américaines qui aient ce genre d'informations."
"Des supputations à des fins de déstabilisation politique"
Il y a dix ans "on entendait déjà la même chose" au sujet du président russe, explique Sylvie Bermann, consultante diplomatie pour BFMTV, ancienne ambassadrice de France en Russie. "Cela ne veut pas dire qu'il n'est pas malade, mais là on est dans la guerre de communication et très clairement dans la propagande" de Kiev.
"C'est un marronnier, ça attire, ça fait parler", abonde Alexandre Melnik.
Le but "n'est pas de dévoiler l'état de santé de Vladimir Poutine mais d'influer sur ses proches et de tenter d'avoir une révolution de palais justifiée par le fait que Poutine ne serait plus maître de ses moyens", abonde Floran Vadillo. Ces nouvelles "sont donc des supputations à des fins de déstabilisation politique", pour le spécialiste du renseignement.
Pour Alexandre Melnik, ce genre de rumeurs lancées est "un déni de la réalité, c'est une erreur stratégique de miser là-dessus, il faut neutraliser Vladimir Poutine autrement", déclare-t-il, rappelant que malade ou pas, en tout cas "il est toujours là".