Publié par CEMO Centre - Paris
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Iran : manifestation, répression... où va la révolution du peuple iranien ?

mercredi 23/novembre/2022 - 08:18
La Reference
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Les manifestations en Iran après la mort de Mahsa Amini, le 16 septembre, se prolongent malgré une répression sanglante. La Dépêche fait le point sur cette lutte féroce entre le régime et ses opposants. 
Plus de deux mois après la mort de Mahsa Amini aux mains de la police des mœurs, les manifestations contre le régime iranien se poursuivent, avec un bilan humain très lourd. La Dépêche vous résume la situation de la mobilisation contre le gouvernement théocratique, qui ne faiblit toujours pas.
Quelle est la situation ?
"On dénombre, au dernier décompte (NDLR : le 22 novembre), 480 morts et 16 800 arrestations selon Iran Human Rights, le bilan est probablement plus lourd", note Carole André-Dessornes. Selon la spécialiste du Moyen-Orient, "il faut bien noter que l'intensité des manifestations est toujours très forte. La mobilisation a commencé suite à la mort de Mahsa Amini, une Kurde, mais il s'agit d'une révolte de toute la société, hommes comme femmes. Le Kurdistan est très touché par les manifestations mais il s'agit d'un mouvement à l'échelle de l'Iran".
Une mobilisation qui s'est propagée à tous les niveaux de la société, puisque deux actrices ont été arrêtées dimanche 20 novembre et que l'équipe nationale iranienne de football a annoncé son soutien aux manifestants.
De plus, estime Carole André-Dessornes, "la question du voile est dépassée ; il s'agissait à l'origine d'un rejet du voile obligatoire, et non pas du voile tout court, mais la mobilisation actuelle concerne le régime lui-même. Les manifestants, dont beaucoup sont jeunes et issus de la troisième génération depuis la révolution, manifestent contre un ennemi commun, l'Etat théocratique".
Comment s'applique la répression ? 
La réaction de Téhéran contre les manifestants depuis le 16 septembre a été particulièrement violente. "Le régime théocratique est devenu une kleptocratie et un régime qui tue, aux yeux d'une partie de la population, indique Carole André-Dessornes : chaque mobilisation, comme en 2009, 2015, 2017 ou 2019-2020 a été réprimée, avec un bilan de plusieurs milliers de morts au total".
Comme le rappelle la géopolitologue, "au-delà des décès au cours des manifestations, 6 peines de mort ont déjà été prononcées contre des prisonniers, et 227 députés ont appelé à appliquer la "loi du talion" contre les manifestants arrêtés". "Le régime emploie également à nouveau sa politique des otages, usée dès 1979, pour faire pression sur les autres pays. Résultat : 7 Français sont aujourd'hui retenus en Iran", alerte Carole André-Dessornes.
"Les voix dissidentes au sein de l'armée et du gouvernement restent par ailleurs mineures, on n'a pas de signe d'une probabilité de rupture au sein du régime, juge la géopolitologue. Les Pasdaran, ou gardiens de la révolution, n'interviendront très probablement pas contre le régime du fait de leur loyauté. Il y a cependant une vraie rupture entre ces organes et la société, qui les hait."
Quel futur à ce mouvement ?
S'il est impossible de prédire l'avenir, la situation semble cependant pousser à la radicalité, comme l'explique Carole André-Dessornes. Si le régime recule et décide de ne plus rendre obligatoire le voile, les manifestations ne s'arrêteront pas malgré tout. Il s'agit désormais d'une lutte contre le régime, le mouvement est allé trop loin. La parenthèse réformiste du pays s'est achevée, et plus personne ne croit désormais à une réforme du régime". Au bout du compte, comme le souligne Carole André-Dessornes, "on peut supposer que plus la répression sera forte, plus les manifestations redoubleront de virulence".

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