Publié par CEMO Centre - Paris
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L'équilibre de la cyber-terreur

jeudi 22/novembre/2018 - 04:05
La Reference
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L'institut Montaigne publie un rapport sur le "cyber ouragan" qui nous menace. Et si les forces en présence se neutralisaient?

Les Japonais, les Californiens vivent dans cette incertitude-là : qu'un jour la terre s'entrouvre, que la mer pique une colère cataclysmique, que la catastrophe les raye de la carte du monde, eux et leur pays. Depuis qu'il est devenu un média de masse, omniprésent, internet s'inquiète de même de sa propre disparition, craint le Big One, le bug systémique ou la cyber-attaque qui mettra ses serveurs ou ses hubs en rideau. 

Dire qu'il s'amuse à se faire peur serait très exagéré : la perspective d'une panne globale, majeure, accidentelle ou provoquée, est terrifiante. Ce serait un désastre économique, sanitaire, militaire, technologique et écologique tel qu'il ferait passer la crise de 1929 et ses conséquences pour une aimable blague de traders. La généralisation des objets connectés, la montée en puissance de l'intelligence artificielle, dans tous les secteurs d'activité, de la grosse industrie au quotidien le plus trivial, rend la menace plus effrayante encore. 

Qui dit menace, dit rapports, et sur le sujet, ils sont légion. Signé par l'institut Montaigne, le dernier en date est particulièrement alarmiste. Après s'être remémorés quelques agressions d'envergure, en Estonie ou en Ukraine notamment, puis avoir imaginé des scénarios funestes, ses auteurs proposent treize mesures censées mieux protéger la France, ses habitants, sa défense, ses entreprises et ses intérêts contre ce qu'ils appellent le "cyber ouragan" à venir. Honnêtement, à les lire, on pense surtout à la ligne Maginot. 

 

Les mesures préconisées ne sont pas toutes des tigres de papier. Certaines sont pleines de bon sens, rappels utiles à un niveau de protection minimal. Mais nombre d'entre elles relèvent au mieux de l'incantation, au pire de l'usine à gaz, quand, notamment, les experts demandent à faire marcher du même pas ou au sein de structures communes tous les acteurs concernés. Les services de renseignement français, pour ne pas dire européens, s'en amuseront sûrement. 

L'institut Montaigne identifie quatre types de méchants : les loups solitaires, les groupes militants, la mafia et surtout les Etats, de loin les plus dangereux. On sait les dégâts qu'ont déjà provoqués les hackers russes manipulés par Moscou aux Etats-Unis ou en Grande Bretagne, leurs homologues israéliens en Iran, les Chinois un peu partout, plus tous ceux, bien plus nombreux, engendrés par les Français, Américains, Indiens, Nord-Coréens... dont personne n'a intérêt à ce qu'on les rende publics. 

Comme au bon vieux temps de la Guerre Froide, le secret est une arme, d'autant plus performante que le secret est associé à une publicité bien maîtrisée. Les principaux protagonistes de ce qui est, depuis des années déjà, une cyberguerre la manient avec dextérité. Ils alternent les actions symboliques et les contre-attaques dissuasives, dans le secret le plus souvent, dans une transparence feinte quand il faut délivrer un message. Ce message : "Ne m'emmerdez pas, j'ai aussi les moyens de vous faire très mal". Dans les années 1950, on parlait d'équilibre de la terreur, le concept n'a pas vieilli, son efficacité non plus.              

 

Et les électrons libres, vous demandez-vous, idéologues radicalisés, fous furieux ou groupe criminels ? Contre eux aussi, nous sommes en guerre, une guerre asymétrique, comme celle que mènent dans la vraie vie les démocraties contre le terrorisme ou la délinquance organisée. Contre eux aussi, les solutions sont connues : anticipation, surveillance, renseignement. Contre eux aussi, les mesures de l'institut Montaigne ont leur limite. Comme l'Etat d'urgence, Vigipirate ou les vigiles à l'entrée des magasins, elles servent moins à combattre qu'à rassurer. 

 

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