Publié par CEMO Centre - Paris
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Tunisie : Abdelfattah Mourou, la candidature qui divise les Frères musulmans

jeudi 20/octobre/2022 - 02:17
La Reference
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Après des mois de délibérations le Conseil de la Choura d'Ennahdha, l'organe politique des Frères musulmans en Tunisie, a décidé de nommer son vice-président et président du Parlement intérimaire, Abdelfattah Mourou, aux élections présidentielles prévues pour la mi-septembre. Cette décision a plutôt divisé la Confrérie qu’elle ne l’a embrouillée.

Après des désaccords au sein du mouvement sur sa position concernant les prochaines élections présidentielles, en particulier après la mort du président tunisien Béji Caïd Essebsi, à la fin du mois de juillet dernier, Ennahdha a fini par décider avant la déclaration se son président, Rashid Ghannouchi annoncant que le Conseil de la Choura avait approuvé la nomination de Mourou par 98 voix.

Déclarations colorées

À la lumière des informations évoquées plus tôt cette année sur la possibilité de présenter Ghannouchi aux prochaines élections présidentielles, Mourou a indiqué dans une interview accordée à France 24: il serait judicieux de présenter un candidat hors du mouvement, car la société n'est pas prête à accepter un Président issu du parti. Il a souligné que la victoire du mouvement aux élections municipales ne signifie pas le déclin du mouvement de la rue, mais cela illustre la taille au sein de l’opinion, que nous devons utiliser dans l'intérêt du peuple, afin de ne pas perdre la confiance des masses que nous avons obtenues.

Dans son premier commentaire sur la recommandation d'Ennahdha, Mourou s'est dit satisfait de cette nomination et de la confiance que lui accordaient les dirigeants et les cadres du parti, qualifiant cette décision d'"avis prudent".

Il a affirmé que cette recommandation avait un impact non seulement sur Ennahdha, mais également sur le pays, dans la mesure où elle soutenait la vie partisane, basée sur la démocratie.

Bien que Mourou n'ait pas été accepté par la population tunisienne lors de plusieurs élections, il est considéré comme l'un des principaux contrôleurs du mouvement Ennahdha et il est intelligent dans ses déclarations ainsi que dans ses décisions politiques. Il a renoncé à l'idée d'appliquer la loi islamique lorsqu'il a constaté qu’elle n’est pas bien accueillie par l’opinion. Il a cherché à atteindre son objectif et à gagner la sympathie des Tunisiens. Cela se lit dans sa déclaration lors d’une sortie médiatique: « Quiconque se précipite sur une question prématurément est punit par sa privation ».

Qutbiste momentané

Dans l’une de ses interviews en octobre 2014 avec un journal arabe, il a déclaré: « Il est possible suspendre le mouvement à un moment donné, car les conditions ne lui permettent pas de progresser, mais l'objectif principal du mouvement est de faire appliquer la loi de Dieu», en ajoutant: « Sayyid Qutb Kafr a excommunié les communautés parce qu’elles n’appliquent pas la loi de Dieu ».

L'impact des idées de Qutb sur Mourou était clair, mais l'intérêt le forçait parfois à mettre de côté ces idées ou à les abandonner temporairement.

Par rapport à la liberté de la femme il a indiqué dans une déclaration faite au journal Al Qods : « Ceux qui se noient dans le débat, quand est-ce que les femmes se voilent ou se déshabillent, là n'est pas le plus important, le plus important est de l’amener à parvenir à la conviction, d'accumuler des connaissances et de différencier la prise de conscience, et c'est ce que nous essayons de faire dans la société tunisienne aujourd'hui ».

Avis d’un chercheur tunisien

Le chercheur tunisien Hadi Yahmed a expliqué que le choix de Mourou par Ennahdha reflétait le pragmatisme du mouvement, soulignant qu'il ne pouvait parier sur la nomination du Premier ministre Youssef Chahed, d'autant plus que son parti, "Nidaa Tounes", était au bas des scrutins.

Il est à noter que Mourou a commencé son travail de prêche dans les mosquées et les madrasas en 1960, puis s'est tourné vers l’action politique avant de donner son accord à Ghannouchi pour créer un mouvement islamiste, après avoir tenté de réunir une centaine de personnes. Les deux figures furent arrêtées par la police tunisienne.

Après avoir quitté la prison, Mourou a décidé de créer une organisation secrète (le groupe islamique), a commencé à communiquer avec les Frères musulmans et a activé cette organisation après une série de dons en publiant plusieurs journaux, livres et magazines.

En 1981, le groupe change de nom et devient Mouvement Ennahdha. Après des violations de la loi, Mourou est de nouveau emprisonné entre 1991 et 1992. Son mouvement diminue considérablement. Après sa libération, il décide d'arrêter l’action politique.

Après la révolution tunisienne (le 17 décembre 2010), il reprend l’action politique après le retour en exil de Rafik Darb Ghannouchi.

Les deux partis ont accepté de contester les élections de l'Assemblée nationale constituante sur une liste indépendante, mais ont échoué lors de ces élections.
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