Quand la Russie menace de reprendre l'Alaska aux États-Unis
mardi 12/juillet/2022 - 03:30
Le président de la chambre basse du Parlement russe a menacé mercredi 6 juillet de reprendre l'État de l'Alaska si les États-Unis saisissent ou gèlent leurs avoirs à l'étranger. Cela fait plusieurs années que le sujet d'une Alaska russe est abordé dans les médias, ces territoires faisaient autrefois partie de l'Empire russe.
La menace est à peine voilée. "Que les États-Unis se souviennent : ils [ont] un morceau du territoire [russe], l'Alaska", défie Viatcheslav Volodine, lors d'une session parlementaire mercredi 6 juillet, rapporte le journal russe indépendant The Moscow Times. Le président de la Douma, chambre basse du Parlement, enjoint Washington à "réfléchir" avant de saisir ou geler les avoirs russes à l'étranger, "car nous avons, nous aussi, quelque chose à reprendre."
Prenant note de la proposition du vice-président de la Douma d'organiser un référendum en Alaska pour que l'État rejoigne la Russie, Viatcheslav Volodine assure tout en retenant un rire que "nous n'interférons pas dans leurs affaires intérieures".
Ces provocations, brandies pour "réveiller le patriotisme [...] et exciter les velléités nationalistes" de la population russe selon Carole Grimaud Potter, professeure de géopolitique russe interrogée par TF1, ont eu l'effet escompté. Aussitôt, une campagne intitulée "l'Alaska est à nous" a été créé sur les réseaux sociaux. Des panneaux publicitaires floqués du même slogan ont même été installés dans la ville sibérienne Krasnoïarsk, note le média NGS24.
Quand l'empire russe s'étendait jusqu'en Amérique du Nord
Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que Moscou partage ostensiblement son souhait de voir le drapeau russe flotter au-dessus du plus grand État américain. Depuis une dizaine d'années, le sujet est régulièrement abordé dans les médias russes. En mars dernier, c'était Oleg Matveychev, membre de la Douma et conseiller de communication de Vladimir Poutine, qui exigeait des États-Unis "la restitution de toutes les propriétés russes, celles de l'empire russe, de l'Union soviétique et de la Russie actuelle" – l'Alaska, donc, mais aussi l'Antarctique (selon lui "découverte" par la Russie) et Fort Ross, une ancienne et brève colonie russe en Californie, rappelle The Daily Mail.
Si l'Alaska est habitée depuis l'époque des grandes glaciations, il y a près de 15 000 ans, sa "découverte" est attribuée à Vitus Béring, un marin danois au service de l'Empire russe, en 1741. Ce n'est que quarante ans plus tard que les Russes établissent leurs premières colonies et prennent pleinement possession des terres.
À la fin du XVIIIe siècle, les affaires de la Compagnie russe d'Amérique, spécialisée dans le commerce de fourrures, sont prolifiques. L'Empire russe s'étend vers le sud, à la recherche de terres fertiles, et ouvre même un comptoir en Californie, à Fort Ross, près de San Francisco. Saint-Pétersbourg a même des vues sur Hawaï, mais se fait expulser de l'île en 1817 après y avoir construit un fort et hissé un drapeau.
À la fin du XIXe siècle, les profits de la Compagnie déclinent. Face aux difficultés financières et la peur de voir tomber l'Alaska aux mains du rival britannique, le Tsar Alexandre II cède en 1867 tous ses territoires nord-américains aux États-Unis, pour la somme de sept millions de dollars. Avant la vente des terres, on estime qu'environ 2 500 Russes y habitaient.