En Irak, la sécheresse fait resurgir une cité engloutie
vendredi 03/juin/2022 - 08:58
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Décembre 2021. Il fait sec, trop sec, et l’Irak a besoin d’eau pour son agriculture. Le Tigre, fleuve qui traverse le pays, est mis à contribution, notamment le réservoir du barrage de Mossoul. Le niveau d’eau baisse, et là, au milieu des sédiments, des structures anciennes émergent. Celles d’une cité de l’âge du bronze qui dormait sous les flots.
Profitant de l’occasion, des archéologues allemands des universités de Fribourg-en-Brisgau et de Tübingen et l’organisation kurde d’archéologie se sont dépêchés de lancer des fouilles, dont les résultats ont été présentés le 31 mai.
Il faut dire que les ruines d’un ancien palais avaient déjà été entraperçues en 2018, à l’occasion d’une précédente sécheresse. Les équipes se tenaient donc prêtes à intervenir, et ont pu cette fois-ci cartographier et mettre au jour l’intégralité du palais, avec ses peintures murales, ainsi qu’un complexe artisanal et des fortifications monumentales avec des tours.
Remarquablement bien conservés
Grâce au palais, les archéologues ont identifié les ruines comme celle de la cité de Zakhiku, vieille de 3 400 ans et probablement détruite en 1350 avant J.-C. par un tremblement de terre. La ville faisait partie du royaume du Mittani, une puissance encore mal connue mais qui s’étendait de la Méditerranée jusqu’à l’actuelle Bagdad lors de son apogée. Il fut ensuite supplanté par les Assyriens.
« Nous savons que ce royaume traitait d’égal à égal avec les Égyptiens, mais les seules et rares informations que nous avons proviennent de fouilles à Tell Brak, en Syrie », a détaillé Ivana Puljiz, de l’université de Fribourg lors de l’annonce.
Avec ce nouveau chantier mené en janvier et février 2022, les archéologues espèrent en apprendre plus sur cette dynastie. La ville semble s’être déployée en deux épisodes, et le palais devait à l’époque être construit sur une terrasse surplombant la vallée du Tigre. « Le grenier de stockage découvert est particulièrement grand, ce qui suggère l’importation et la conservation de quantité de biens venus de toute la région », a précisé l’archéologue allemande.
Surtout, plus d’une centaine de tablettes d’argile recouvertes d’écritures cunéiformes ont été retrouvées dans des pots et des jarres. Des écritures qu’il faut maintenant restaurer puis déchiffrer. Les édifices, tous en terre crue, et ces écrits d’argile sont remarquablement bien conservés. Les experts pensent que cela pourrait être dû à l’effondrement sur eux-mêmes des bâtiments, les hauts murs d’enceinte étant alors tombés comme un couvercle protecteur.
Aujourd’hui, l’eau du réservoir de Mossoul a repris ses droits sur les ruines, et la cité de Zakhiku est à nouveau engloutie. Jusqu’à une prochaine sécheresse.