Seine-Saint-Denis : faute de place, les réfugiés ukrainiens sont redirigés vers «le confort de la province»
« La région parisienne est
complètement saturée, nous ne pouvons leur proposer que des hébergements
temporaires ici », regrette Hermine Metias, directrice d’un centre
d’hébergement pour les réfugiés ukrainiens à Noisy-le-Grand. Depuis deux
semaines, le groupe associatif SOS a ouvert 1 234 places supplémentaires sur
huit sites franciliens pour héberger les personnes fuyant la guerre en Ukraine.
« En Île-de-France, nous
n’avons que 500 places disponibles actuellement, déplore Louiza Daci,
directrice régionale asile et intégration du groupe SOS. Notre stratégie est
donc d’envoyer les réfugiés ukrainiens en province. » Pour le site noiséen,
124 places ont été ouvertes. Ce mercredi, 65 réfugiés ukrainiens vivaient dans
ce centre. Quarante réfugiés sont partis la semaine dernière en direction du
Gard. « En province, il y a beaucoup plus de confort », poursuit
Louiza Daci.
Une nouvelle vie à construire
Tatiana et Mickaël habitent
depuis le 16 mars dans un des logements de ce centre d’hébergement. Ils
vivaient dans la banlieue de Kiev. Ils sont accompagnés de leur petit-fils de 3
ans et demi, Marc. « On est prêt à prendre n’importe
quel travail pour pouvoir le nourrir mais aussi envoyer de
l’argent à notre fille en Ukraine, affirme Tatiana, les larmes aux yeux. On
veut bien aller n’importe où en France pour travailler. »
Seulement, leur problème, c’est
« la barrière de la langue ». Le couple ne parle ni ne comprend le
français. Le groupe SOS a donc décidé de mettre en place des ateliers
linguistiques tant pour les adultes que pour les enfants.
Pour Anastasia, 30 ans, c’est le
même problème. Elle rédigeait une thèse en aéronautique dans une université
près de Kiev. Elle ne peut la poursuivre. Comme son mari parle arabe, il a pu
reprendre la profession qu’il exerçait en Ukraine. « Il a trouvé un poste
de boucher à Montrouge (NDLR : dans les Hauts-de-Seine), se réjouit
sa femme. J’espère que, pour le moment, nous pourrons trouver un logement
stable près de son travail et que ses deux jeunes fils pourront aller à
l’école. » Elle compte terminer sa thèse et retourner en Ukraine pour
« reconstruire le pays ».
« On ne doit pas subir de
discriminations »
Ces deux familles ont reçu une
autorisation provisoire de séjour, tout comme 10 500 ressortissants arrivés en
France dans le cadre de la protection temporaire proposée par l’Union
européenne aux réfugiés ukrainiens. Le sort des étudiants étrangers provenant
d’Ukraine, lui, reste problématique.
« On est tous dans la même
situation : on a tous fui la guerre, fustige Angeliqua, étudiante
congolaise expatriée à Odessa depuis six ans et hébergée, elle aussi, à Noisy-le-Grand.
On ne doit pas subir de discriminations ! » Du haut de ses 24 ans,
elle étudiait la médecine depuis plus de cinq ans en Ukraine.
« Le droit d’asile ne peut
être à double vitesse », s’agace Stéphane Troussel, en visite ce mercredi
dans ce centre d’hébergement. Le président du conseil départemental de
Seine-Saint-Denis appelle le gouvernement à venir en aide à ces étudiants
étrangers.