La Libye face au risque d’un nouveau schisme entre « autorités parallèles »
Le premier ministre, Abdel Hamid Dbeibah, refuse de s’effacer devant Fathi Bachagha, son successeur désigné par le Parlement.
Une fois encore, la Libye bascule dans l’imbroglio institutionnel et la fragmentation de ses pôles de pouvoir. Un an après la formation d’un « gouvernement d’union nationale » (GUN), heureuse surprise ayant nourri l’espoir d’une réunification d’un pays déchiré depuis 2014 par la rivalité entre la Tripolitaine (ouest de la Libye) et la Cyrénaïque (est), le risque d’une duplication des autorités guette de nouveau.
Jeudi 10 février, le Parlement siégeant à Tobrouk (est) a nommé au poste de premier ministre Fathi Bachagha en remplacement du chef du GUN en titre, Abdel Hamid Dbeibah, investi en mars 2021 et qui refuse son éviction. « Je n’accepterai aucune nouvelle phase de transition ou autorité parallèle », a averti M. Dbeibah, mardi, dans un discours télévisé. Il a précisé que son gouvernement intérimaire ne remettrait le pouvoir qu’à « un gouvernement élu »
Ce télescopage entre deux autorités jette une ombre sur la stabilité libyenne, alors que le pays pansait les plaies ouvertes par la « bataille de Tripoli » (avril 2019-juin 2020). Le conflit avait vu s’affronter autour de la capitale les forces assaillantes du maréchal Khalifa Haftar, l’homme fort de l’Est, et une coalition de groupes armés de l’Ouest libyen défendant le gouvernement de Tripoli, reconnu par la communauté internationale. Les combats avaient approfondi la partition du pays, dix ans après la chute du régime de la Grande Jamahariya (« Etat des masses ») de l’ancien Guide, Mouammar Kadhafi, tué à Syrte par les insurgés en 2011. Un cessez-le-feu, signé en octobre 2020, avait néanmoins ouvert la voie au printemps 2021 à un gouvernement de réconciliation dirigé par M. Dbeibah, un sulfureux homme d’affaires de Misrata ayant rassemblé autour de lui des figures de l’Ouest comme de l’Est.