La Russie, pas vraiment le pays le plus fan du concept de tendre l’autre joue, devrait riposter avec ses propres représailles financières. De quoi faire trembler Bercy ? Pas vraiment, à en croire le ministre de l’économie himself, Bruno Le Maire évoquant une « économie française peu exposée » et des conséquences « contenues » en cas d’attaque commerciale.
La Russie, colosse à la monnaie d’argile
Son ministère, interrogé par 20 Minutes, se montre plutôt rassurant sur le faible impact de Moscou pour l’économie française : en 2021, les exportations vers la Russie cumulaient à 6,5 milliards d’euros, faisant du pays des tsars le quinzième marché de la France et le septième hors Union européenne. La Russie ne représente que 1,3 % des exportations françaises. Côté dépendance inverse, la France importe 9,7 milliards d’euros par an de la Russie, soit 1,7 % du total des importations de Paris, principalement en gaz. Le pays de Tolstoï et Dostoievski n’est que le dix-septième fournisseur de la France.
« La Russie reste une véritable puissance géopolitique et militaire, mais c’est un nain économiquement », tranche Sébastien Jean, économiste spécialiste du commerce international et directeur de recherche à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae). Le PIB russe représente par exemple un peu moins de 60 % du PIB français. En conséquence, « une guerre économique serait plus coûteuse pour Moscou que pour Paris », rajoute l’expert.
Guerre et paix
Actuellement, 700 filiales d’entreprises françaises sont implantées sur le territoire russe, précise Bercy. Sont-elles plus exposées que le reste de l’économie ? « Dans l’extrême majorité des cas, ces filiales ont une importance relativement limitée à l’échelle du groupe auquel elles appartiennent », assure Sébastien Jean. De quoi limiter les risques, d’autant plus que les Russes ont tout intérêt à les préserver. Selon le ministère français de l’économie, ces filiales emploieraient 200.000 travailleurs dans le pays, faisant de la France « le premier recruteur étranger en Russie », appuie Jacques Sapir, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales. Particulièrement dans les domaines de l’automobile avec Renault, de la grande distribution avec Auchan et des hydrocarbures avec Total. Or, dans un pays qui connaît une inflation à 8 % et en proie à de graves sanctions économiques, ne pas autosaboter son commerce interne semble une stratégie pertinente.
« La Russie déploie de gros efforts pour attirer des investisseurs étrangers, elle ne va pas tout faire capoter pour quelques semaines de crise », prédit Sébastien Jean. Même analyse du côté de Jacques Sapir : « En l’état actuel des choses, la Russie ne fera rien contre les filiales françaises sur son sol ».