Funérailles en Irak pour 41 yazidis découverts dans une fosse commune
jeudi 09/décembre/2021 - 08:01
Au rythme lancinant des tambours et flûtes traditionnelles, deux femmes dispersent des volutes d'encens dans les airs. Dans le nord de l'Irak, des centaines de personnes ont assisté aux funérailles de 41 yazidis découverts dans un charnier du groupe Etat islamique (EI).
A Kojo, bourgade près du foyer historique des Yazidis sur les monts Sinjar, ils ont accueilli avec émotion la condamnation en Allemagne d'un jihadiste irakien pour "génocide" --même s'ils disent attendre plus d'actions de l'Irak et de la communauté internationale.
Jeudi, 41 cercueils en bois, recouverts d'un drapeau irakien et de gerbes de fleurs, étaient posés à même le sol. A leur pied, les portraits des défunts, hommes et femmes.
Ils font partie des milliers de victimes de l'EI, tués à l'été 2014 quand les jihadistes se sont emparés de Sinjar et d'un tiers de l'Irak. Leurs restes ont été exhumés d'une des fosses communes à Kojo. Leur identité a pu être établie grâce à des tests ADN.
Des soldats irakiens transportent les défunts. Ils seront enterrés près de l'école du village, abandonné par ses habitants.
Des liturgies yazidis accompagnent la cérémonie. Les femmes se frappent la poitrine, lèvent les bras au ciel, en pleurant.
Tout de blanc vêtus, des hommes battent leurs tambours et jouent de la flûte. Deux jeunes femmes font tournoyer des encensoirs dans les airs.
- "Paix, vengeance" -
Soleimane Hussein, 53 ans, enterre son père, un cousin et plusieurs oncles. Avant les tests ADN, il avait reconnu leurs corps grâce aux vêtements et leurs effets personnels.
Ce qu'il ressent? "Comme les familles des martyrs, de la tristesse", lâche ce travailleur journalier.
Il salue toutefois une "victoire" pour les Yazidis, après le verdict prononcé fin novembre par un tribunal de Francfort, qui a condamné à la perpétuité un Irakien pour "génocide, crime contre l'humanité ayant entraîné la mort, crimes de guerre et complicité de crimes de guerre".
"Mais il faut prendre des actions contre les autres", lâche-t-il en allusion aux jihadistes. "Comme ça on pourra trouver la paix, venger notre honneur et nos martyrs, nos enfants et nos parents".
"Nous espérons que tous les pays, et surtout l'Irak, agiront contre les terroristes".
L'EI a été défait en 2017 en Irak. Un premier charnier avait été exhumé à la mi-mars 2019 à Kojo, dont est originaire Nadia Murad, survivante yazidie et lauréate du prix Nobel de la paix 2018.
Depuis les opérations d'identification se poursuivent au ralenti.
Kiji Ammo Sello, 49 ans, enterrait jeudi sa belle-soeur et ses oncles. En février, il a enterré cinq de ses proches: ses soeurs et leurs enfants.
A chaque fois "notre blessure se rouvre", lâche-t-il. "En sept années nous n'avons connu aucun repos".
Malgré tout, "le verdict allemand nous a apporté beaucoup de joie", confie-t-il. "Nous réclamons que soient jugés tous les auteurs des crimes de l'EI".