La crise entre Emmanuel Macron et Boris Johnson décryptée par une experte
Sur fond de Brexit, de tensions avec les pêcheurs français sur les licences qu’ils n’ont pas obtenues et de crise migratoire qui s’intensifie dans la Manche, la relation diplomatique franco-britannique s’envenime.
La ministre britannique de l’Intérieur britannique a même été exclue d’une réunion européenne sur le sujet des migrations qui doit se tenir dimanche à Calais. Pour mieux cerner les causes et les potentielles conséquences d’une telle escalade, Claude-France Arnould, spécialiste des questions européennes et ancienne ambassadrice de France en Belgique (elle est actuellement conseillère de Thierry de Montbrial, le président de l’Institut français des relations internationales, Ifri) répond aux questions du HuffPost.
Après le drame survenu dans la Manche, Boris Johnson estime que c’est à la France de reprendre sur son sol tous les migrants. Est-ce une proposition sérieuse ou réaliste?
Les migrants de Calais veulent aller au Royaume-Uni, désespérément, et sont aux mains des mafias qui organisent ce trafic d’êtres humains, ils ne veulent pas rester en France. Quand on a démantelé la jungle de Calais, on a constaté que les gens ne voulaient pas être installés en France. Ils voulaient aller au Royaume-Uni. Ce sont “leurs” candidats à l’immigration.
La France laisse-t-elle passer volontairement ces migrants vers le sol britannique comme le sous-entendent certains journaux anglais?
Je ne crois pas. Il y a un vrai professionnalisme des policiers et des autorités concernées. On ne laisserait pas volontairement partir les gens dans des embarcations comme ça, ce ne sont pas nos méthodes et nos valeurs. C’est très difficile de débusquer les manœuvres des passeurs qui cachent ces départs.
Faut-il alors réviser les accords du Touquet qui fixent la frontière en France en échange d’argent britannique?
Quand des accords ne sont plus efficaces face à une situation donnée, il est normal de les réexaminer, mais sereinement et techniquement. Le président Macron l’a d’ailleurs mentionné quand il était ministre.
Expliquer que, sur tous les sujets, depuis le Brexit, c’est la faute des Français est évidemment considéré côté français comme inacceptable.
Plus largement, comment expliquer que le ton entre Emmanuel Macron et Boris Johnson ne cesse de monter?
Le ton monte alors que les sujets sont très graves, très sérieux, très difficiles. Celui des migrants particulièrement, mais il y a dans le même temps plusieurs autres sujets à régler comme la pêche ou la question de la libre circulation des marchandises à la frontière avec l’Irlande.