Sommet Afrique-France : Emmanuel Macron veut “refonder” la relation avec le continent
Un événement inédit tourné vers la jeunesse africaine. Vendredi 8 octobre s’ouvre à Montpellier un sommet Afrique-France d’un nouveau genre visant à "refonder" la relation entre paris et le continent.
Pour la première fois depuis 1973, début des sommets France-Afrique (devenus Afrique-France), aucun chef d'État du continent n'est invité. Ce nouveau format doit permettre, selon la présidence française, "d'écouter la parole de la jeunesse africaine" et de "sortir des formules et des réseaux obsolètes". En clair, rompre, encore et toujours, avec la "Françafrique", ses pratiques opaques et ses réseaux d'influence.
Ce sommet se tient à un moment où l'influence de la France dans son ancien pré-carré est de plus en plus disputée, particulièrement par la Russie, et où Paris est en crise ouverte avec le Mali et l'Algérie.
Les “sujets qui fâchent” sur la table
Ce seront donc de jeunes entrepreneurs, artistes, sportifs du continent qui rencontreront leurs alter ego français et de la diaspora pour discuter de sujets économiques, politiques et culturels. Puis un panel de douze jeunes africains, du Mali, de la Côte d'Ivoire, de la Tunisie, d'Afrique du Sud, du Kenya... s'entretiendra l'après-midi avec le président Macron en séance plénière.
Ce panel a été sélectionné à l'issue des dialogues menés pendant des mois à travers le continent par l'intellectuel camerounais Achille Mbembe, chargé de préparer le sommet. Dans son rapport, remis mardi au président français, le philosophe estime notamment que la France est trop déconnectée "des nouveaux mouvements et des expérimentations politiques et culturelles" portés par la jeunesse africaine.
Il souligne également que de tous les différends, "aucun n'est aussi corrosif que l'appui présumé de la France à la tyrannie sur le continent". Le récent exemple tchadien, lorsque le président français a immédiatement apporté son soutien à la junte militaire mise en place par le fils Deby après l'assassinat de son père, est dans toutes les têtes.
Interventions militaires françaises, souveraineté, gouvernance, démocratie, "les sujets qui fâchent seront sur la table", insiste l'Élysée. "L'Afrique est travaillée par deux forces : celles de l'innovation et celles de la clôture, des forces de mort. La question principale que poseront les jeunes à Macron c'est : de quel côté êtes-vous ?", assurait, jeudi, Achille Mbembe au micro de France inter.
Une initiative qui fait polémique
Le penseur du postcolonialisme a été sévèrement critiqué par certains de ses pairs africains pour avoir accepté de piloter le sommet.
Dans une tribune publiée, jeudi, sur le site senegalactu.info, l'écrivain sénégalais Boubacar Boris Diop dénonce "un faux coup de pied dans la fourmilière". "Le face-à-face entre Macron et la société civile africaine aurait été beaucoup plus crédible ou même fructueux si on avait au moins senti sur le terrain des signes concrets de sa volonté de changement", écrit-il.