Publié par CEMO Centre - Paris
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Tourisme : une crise sans précédent

vendredi 16/juillet/2021 - 09:55
La Reference
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Depuis l'instauration du premier confinement en mars 2020 du fait de la pandémie liée au Covid-19, l’économie du tourisme traverse une crise d’une ampleur inédite à travers le monde. En tant que première destination touristique au monde, la France a été particulièrement touchée. Face à cette situation, quel pourrait être l'avenir de ce secteur ?

"Cette année 2020 a été un choc, c'est plus de 60 milliards d'euros de recettes qui manquent à l'appel pour le tourisme français", selon le secrétaire d’État chargé du tourisme, Jean-Baptiste Lemoyne. Cela représente un tiers du chiffre d’affaires réalisé en 2019. Les recettes domestiques ont chuté de 29 milliards d'euros et celles générées par les voyageurs internationaux de 32 milliards selon Atout France(nouvelle fenêtre), l’agence de développement touristique de la France, chargée de renforcer le positionnement de la destination France à l’international.

Classée au 1er rang des destinations touristiques en nombre de visiteurs internationaux, la France occupe le 3e rang des destinations en termes de chiffre d’affaires généré, derrière les Etats-Unis et l’Espagne, selon les chiffres de l’Organisation de coopération et de développement économiques(nouvelle fenêtre) (OCDE).

Fin 2019, Atout France estime à 170 milliards d'euros les dépenses de consommation liées au tourisme sur le sol français. Le tourisme emploie plus de 2 millions de salariés directs et indirects, dont 1,4 million d’emplois directs. Les secteurs directement liés à l’arrivée de touristes, comme l’hôtellerie et la restauration, représentent environ 6% du PIB. 

Avant la pandémie de Covid-19, le nombre de touristes internationaux en France était en hausse de 4% (croissance identique à la croissance mondiale). Cette même année, les hébergements collectifs français battaient un nouveau record de fréquentation avec près de 442 millions de nuitées. Globalement, la croissance du tourisme en France est régulière depuis plusieurs décennies. Le tourisme a connu des baisses d'activité, par exemple en 2015 et 2016, à la suite des attentats, mais elle était remontée au niveau de 2014 dès 2017.

Les conséquences sur l’emploi et sur les finances des entreprises du secteur sont importantes. Par exemple, l’hôtellerie enregistre une diminution de chiffre d’affaires de plus de 50%. En comparaison, d’autres secteurs particulièrement sinistrés amortissent davantage le choc pandémique. Enfin, cette crise sans précédent concerne tous les types de tourisme : de loisir, d'affaires ou culturel.

Un rapport publié conjointement par l’ONU et l’Organisation mondiale du tourisme (OMT(nouvelle fenêtre)), le 30 juin 2021, estime, à l'échelle mondiale, les pertes pour le tourisme à près de 4 000 milliards de dollars sur les années 2020-2021 par rapport au niveau de 2019.

Les conséquences de la pandémie

La crise sanitaire marque un coup d’arrêt sans précédent dans l’histoire du tourisme. La quasi-totalité des secteurs est concernée :

le secteur aérien en France a été très fortement affecté par les restrictions de déplacements. Deuxième pourvoyeur de touristes, le secteur alimente l’ensemble des filières du tourisme. Le nombre de passagers internationaux a diminué de 73,5% entre 2019 et 2020. Les liaisons internationales sont plus affectées que les liaisons nationales (-55%). Par ailleurs, les aéroports ont subi des pertes importantes liées à la baisse du trafic aérien. L'exploitant des aéroports Roissy-Charles-de-Gaulle et d'Orly a annoncé une perte nette de 1,17 milliard d'euros pour 2020, contre un bénéfice net de 588 millions d'euros en 2019. Selon le directeur général (Europe) du Conseil international des aéroports (ACI), "le trafic ne reviendra pas au niveau de 2019 avant 2024 ou 2025"

un tiers des chambres habituellement mises en vente ont trouvé preneur en 2020. Les hôtels haut de gamme ont été les plus touchés par la crise, du fait de la désaffection des touristes internationaux. Les hôtels économiques ont connu des baisses moins importantes de fréquentation. Ils ont été plus nombreux à rester ouverts tout au long de l’année, certains restant mêmes ouverts en période de confinement, notamment pour héberger des travailleurs dits de "première ligne" dont le travail a continué pendant la pandémie, ou pour loger des patients en quatorzaine ou familles de malades. Ainsi, la perte de chiffre d’affaires moyenne dans l’hôtellerie économique est estimée à 53% alors que l’hôtellerie haut de gamme enregistre une perte de 73%. L’hôtellerie parisienne est particulièrement sinistrée, avec un taux d’occupation moyen annuel qui s’établit à 22,6%, contre 80% en 2019.

la restauration a connu un sort similaire. La fréquentation des restaurants a chuté de 35% sur l’année et le chiffre d’affaires a connu un creux à -90% au mois d’avril 2020, selon l'Insee. La baisse a été de 28% en moyenne entre juin et octobre. À l’inverse, la restauration rapide a mieux résisté, enregistrant une baisse de 25% de son chiffre d’affaires. Selon l'OCDE, les mesures de confinement se sont traduites par la fermeture de 75 000 restaurants, 3 000 clubs, et 40 000 cafés, et la mise au chômage technique ou partiel de 1 million de salariés. Seule exception, la vente à emporter, qui a progressé de 25%, livraison et drive réunis.

Pour les agences de voyage, la perte de chiffre d’affaires se situe entre 70% et 80% selon le syndicat des agences de voyages françaises, Entreprises du voyage (EdV), soit 20 milliards d’euros. Dans une question écrite adressée au Sénat en début d’année 2021(nouvelle fenêtre), le sénateur de Vendée Didier Mandelli constate : "Malgré une amélioration de la situation après le premier confinement et une légère reprise de l'activité pendant la période estivale, la crise s'est de nouveau accentuée depuis septembre, entraînant de nouvelles restrictions. Depuis le 14 janvier 2021, le secteur du tourisme et des agences de voyages est cette fois totalement à l'arrêt en raison des nouvelles restrictions de déplacement liées à la crise sanitaire et la fermeture des frontières."

Tourisme culturel, de loisirs, d’affaires... tous les types de tourisme affectés

À l'exception d'une courte période de réouverture autorisée durant l'été et au début de l'automne 2020, les établissements culturels font partie des secteurs économiques les plus durement frappés par la crise sanitaire. Avant la crise sanitaire, l’OMT estime à 40% la part du tourisme culturel dans le monde. En France, cette part grimpe à 50%. La moitié des 68,3 millions de touristes étrangers ont visité un site culturel (musée, monuments historiques…) lors de leur séjour en France en 2017, selon les chiffres clés 2019 publiés par le ministère de la culture. Après la mise en œuvre des mesures de protection sanitaire, de nombreux musées (secteur patrimonial non marchand) ont été dans l’obligation de fermer leurs portes lors des périodes de confinement puis, pour certains, d’instaurer un système de jauge entre les périodes de confinement. La plupart des grands musées français ont ainsi connu une baisse de fréquentation proche de 70% en 2020. C’est le cas du musée du Louvre de Paris, dont le nombre de visiteurs est estimé à 2,7 millions, contre 9,6 millions en 2019. Le musée d’Orsay enregistre une baisse de 76%. Pour faire face à la chute du nombre de visiteurs, les musées ont développé leur offre numérique. Le site internet du Louvre(nouvelle fenêtre) enregistre un chiffre record de 21 millions de visites, et le musée d’Orsay constate une hausse de 40% du nombre de ses abonnés Instagram. Avec la fermeture des musées, sites et monuments historiques, les activités de gestion de ces équipements mais aussi les services de guide conférencier ont été particulièrement affectés. Le secteur patrimonial marchand (gestion des bibliothèques, des archives, activités de guide conférenciers), qui représentait 8% du secteur patrimonial en 2019, a mieux résisté. Le ministère de la culture constate qu’en 2020 les activités patrimoniales marchandes perdent 7% de leur chiffre d’affaires par rapport à 2019, soit 130 millions d’euros environ. L’essentiel se concentre sur la période du premier confinement, avec des pertes s’élevant à un tiers du chiffre d’affaires par rapport à 2019.

Le tourisme de loisirs n’a pas été épargné. Les stations de ski ont connu une chute de leur activité durant l’hiver 2021 à la suite de la fermeture des remontées mécaniques. La perte de de chiffre d’affaires est estimée à 8 milliards d’euros, selon le président des Domaines skiables de France. En revanche les hébergements en montagne ont aussi connu une affluence importante durant l’été 2020 selon le bilan touristique 2020 de l’Insee(nouvelle fenêtre). Le tourisme littoral et le tourisme à la campagne ont globalement mieux résisté. L’Insee constate ainsi qu’au cours de l’été 2020, ces territoires ont bénéficié du report de séjours à l’étranger que les touristes résidents n’ont pas effectués.

Quant au tourisme d’affaires, il a été l’une des premières victimes de cette crise. Selon une enquête sur "l'impact de la crise Covid-19 sur les rencontres et événements professionnels en France(nouvelle fenêtre)" réalisée par Atout France et le cabinet EY, 5% des événements programmés en 2020 ont été maintenus et 54% des événements programmés ont été annulés.

Tourisme : la fréquentation hôtelière a chuté de moitié en 2020

Comment l'État a-t-il adapté son soutien au tourisme ?

Dès la mise en place du premier confinement, l’État organise l’aide aux entreprises du tourisme. Depuis plus d’un an, l’État fait évoluer les dispositifs d’accompagnement de manière à cibler les entreprises en fonction de leur secteur d’activité et de leurs difficultés financières. Ces dispositifs sont régulièrement mis à jour et adaptés au contexte sanitaire :

l'ordonnance du 26 mars 2020 relative aux conditions financières de résolution de certains contrats de voyages touristiques et de séjours(nouvelle fenêtre), qui statue sur les questions de remboursement d'une réservation, pose les premiers jalons du plan de soutien au tourisme ;

le décret du 30 mars 2020(nouvelle fenêtre) instaure un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de Covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation. Le montant des aides va évoluer avec la période de déconfinement. En juin 2020, le fonds de solidarité prend en charge 40% des pertes de chiffre d'affaires constatées par rapport à juin 2019. Ce taux passe à 30% en juillet, à 20% en août.


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